TRANSITERRE

Un silence qui en dit peu

Trois quarante-deuxièmes de cercles,

Telle est la réponse que j’ai reçue lorsque j’ai réussi à demander quel jour nous étions. Cette réponse m’a semblé plutôt arbitraire, mais j’étudierai plus en détail la conception du temps des braves habitants du mystérieux landgraviat sur lequel je suis tombé il y a maintenant près d’une semaine. Pour l’instant, ma présence ne dérange pas trop les Stijeniens, qui sont plus affairés à vivre pleinement qu’à ostraciser les étrangers. Cette volonté se ressent fortement à travers le débit de parole ultra rapide qu’adoptent les occupants de Napušten.

J’ai tout de même eu un certain effet lorsque j’ai franchi les limites des kućište napustenéens, puisque la fatigue et mon manque d’équilibre m’ont projeté sur le sol en produisant un bruit assourdissant. J’ai vite appris que le bruit était très mal vu chez les Stijeniens et que ne pas chuchoter pour s’exprimer représentait un tabou majeur. Cette sensibilité sonore pourrait s’expliquer par les mensurations impressionnantes de leurs oreilles.

À ce jour, le principal soucis auquel je fais face est la façon dont les conversations sont entretenues. Même à l’Odbor, l’assemblée des citoyens, dès que quelqu’un considère ne plus avoir d’intérêt à entretenir la conversation, il part, sans rien dire. À plusieurs reprises au cours des derniers jours, les personnes que j’interrogeais partaient au bout de deux questions. Ce mutisme me rend la tâche difficile, d’autant plus que je ne trouve aucune personne âgée qui pourrait potentiellement m’enseigner certains de leurs mœurs. Lorsque je demande à quelqu’un s’il y a un sage qui pourrait m’aider, il semble que ce concept ne leur est pas familier. Ce même mutisme s’est révélé quand j’ai interrogé les habitants sur les mythes fondateurs de leur Cité.

Leur langage est presque identique au français, mais leur accent est assez singulier. Je le qualifierais d’une sorte de mélange entre les chants de gorges mongols et les chorales traditionnelles bulgares. Des bruits qui se fondent aux différents sons de la nature des alentours de Stijenia, comme si on cherchait à se cacher d’un prédateur.

Raw/Don.

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