Avec l’après-midi peu avancé, il restait pour la plus part d’entre nous, une soirée pour s’occuper avec 43 observateurs de l’usine. Trop fatigué de l’action au travail, peu de personnes interagissaient. Étant encore un étranger aux yeux de mes nouveaux collègues, j’ai jugé de ne pas modifier la scène, par peur de les énerver encore plus. En groupe, chacun partait en une direction différente: certains vers la cafétéria qui servait aussi de bar et d’autre en direction des habitations.
Mes yeux voulaient se fermer, mais en résistant à cette tentation, j’ai décidé de marcher jusqu’à la Forêt des souvenirs, question de bien finir la journée. De plus, ceci était un moment mieux investi que de le passer au lit à attendre le moment présent.
Je ne crois toujours pas avoir compris l’ampleur de mon métier durant cette première journée de « travail », s’il est possible de l’appeler ainsi. Pourtant, il est peut être question de temps avant de connaitre la nature de notre production. Tout de même, maintenant, la journée est finie. Il m’est possible de faire autre chose maintenant.
Il est pourtant bien de ne pas avoir de loi. Il m’est libre de faire tout ce que je voudrais, sans limite!
Venant de loin, sans que je ne puisse le remarquer, un message crié provient jusqu’à moi : « Messages pour observateur Èibhinn provenant de Coordinateur Willis, Dites-lui que son habillement devrait être illégal, bonne fin de journée. Passez le message. »
Bon… Comment réagir…
Il ne faudrait tout même pas que je renvois un message pour le remercier, alors qu’il est techniquement mon patron. Depuis la transition, ce manque de loi m’apparaît plus être des règles informelles. Elles sont toutes aussi présentes, mais elles sont administrées par la société au lieu d’un corps policier. Il y a quelque chose de plus brutale que des lois. Maintenant ma chemise et mon pantalon trop courts et ne vont plus me faire. Pourtant cette envie d’aller à l’encontre de l’opinion de mon patron est là. Que peut-il faire après tout? Est-il vrai que c’est moi qui porte le poids du jugement? Willis va avoir oublié son commentaire. Maintenant, ma perplexité face à mon habillement va rester.
Il faut que j’arrête de penser à ceci. Il me reste le restant de ma journée. Je dois en profiter.
Rendu à la Forêt des souvenirs, la section des poèmes m’attire encore et toujours, même si je ne comprends pas toujours leurs contenus. Assis au pied d’un arbre, casque sur la tête, je me trouvais calme devant l’expérience qui m’enveloppe.
From you, as from burning chips of resin,
Fiery fragments circle far and near:
Ablaze, you don’t know if you are to be free,
Or if all that is yours will disappear.
Alors que j’étais tranquille installé, un feu surgit au loin. Les flammes qui mangent le bois et qui rampent vers le haut de l’arbre. Toute cette connaissance qui se perd en un coup. Seulement un regroupement qui regarde cette tragédie. Nous sommes dans l’inaction. On regarde la scène sans sentiment.
Après un moment, une personne crie enfin : » On doit faire quelque chose »
« Il a raison. Allez chercher des bâtons et des guimauves! Il faut profiter de la braise! »
Plusieurs sont partis de leur côté en courant en revenant avec les objets demandés.
C’est alors que je me suis souvenu du restant de ce poème.
Will only ashes and confusion remain,
-Cyprian Norwid
Leading into the abyss? Or will there be
In the depths of the ash a star-like diamond,
The dawning of eternal victory
C’est alors que j’ai compris, la nature de mon travail: Rien. Ce n’est pas important, c’est là où je peux recueillir un certain plaisir. Mon corps est à la prise de ce rien. Une angoisse qui me travaille que je ne peux contrôler.
Sous les cendres que va devenir l’arbre? Il se peut qu’un diamant s’y retrouve.